Il était une fois un enfant qui avait décidé qu’il n’apprendrait rien dans la vie. Dès sa naissance, il avait pris cette grave décision.
Bien que ses parents fussent de bons parents qui souhaitaient l’initier à la vie, il refusait de les écouter. Il considérait qu’il n’avait rien à apprendre, a fortiori de la part de personnes faisant partie de l’ancienne génération. Tous les savoirs anciens lui semblaient désuets et inutiles. Il considérait qu’il vivait dans un monde entièrement neuf et que, par conséquent, ce que pouvaient lui apprendre les « vieilles personnes » ne lui paraissait pas digne d’intérêt.
Aussi, quand ses parents voulurent lui apprendre à manger par lui-même, il répondit que cela ne l’intéressait pas. Il trouvait ringard de manger avec une cuillère, une fourchette et un couteau. Il pensait qu’il devait avoir sa propre façon de manger, originale et nouvelle. Il n’y avait donc aucune raison qu’il mange comme le faisaient les anciens.
Plus tard, quand ses parents lui proposèrent de lui apprendre à marcher, il répondit que cela ne servait à rien. Il voyait ses parents marcher sur leurs deux jambes et il trouvait cela totalement dépassé. Il fallait inventer une nouvelle façon de marcher, propre à sa génération. Il fallait révolutionner la façon de marcher.
Lorsque ses parents voulurent lui apprendre à lire et à écrire, il refusa à nouveau. Cette pratique lui semblait totalement dénuée d’intérêt. Il ne voulait pas lire des livres écrits par des personnes anciennes qui enseignaient des choses anciennes sur des sujets anciens. Écrire était pour lui une façon de communiquer totalement « has been ». Il y avait d’autres façons de faire. À lui de les inventer. Et de fait, il n’apprit ni à lire ni à écrire.
Ses parents, complètement désespérés, l’inscrivirent alors dans une école privée. Mais il refusa à nouveau d’apprendre. Il pensait déjà tout savoir et n’avait que faire de ce que ses professeurs pouvaient bien lui raconter. Il les trouvait stupides et barbants. Il n’y avait rien qu’il jugeât digne d’intérêt dans ce qu’ils pouvaient lui enseigner. Ils étaient tous vieux et gâteux. Ils passaient leur temps à raconter leur vie et à parler d’événements anciens, de livres anciens et de découvertes anciennes.
Il finit donc pas être renvoyé et retourna vivre chez ses parents qui ne savaient plus quoi faire. Leur fils était comme une forteresse dont toutes les issues étaient closes. Il restait enfermé à l’intérieur, sûr de ses croyances et de ce qu’il pensait. Ses parents avaient tout essayé pour l’en faire sortir, en vain. Ils consultèrent alors un psychologue qui leur répondit par cette phrase énigmatique : « Peut-on faire sortir un seigneur de son château ? »
Il n’apprit à pratiquer aucun sport, à jouer d’aucun instrument de musique, à exercer aucun art. Il ne s’intéressait strictement à rien et passait ses journées à ne rien faire. Il ne regardait pas la télévision, il n’allait pas au cinéma, il ne lisait aucun livre, il ne regardait aucune peinture et n’écoutait rien, pas même le chant des oiseaux. Il restait des heures à ne rien faire, refusant d’apprendre quoi que ce soit du monde ou des autres.
Quand il eut dix-huit ans, ses parents lui demandèrent de chercher un travail pour prendre son indépendance. Mais comme il ne savait même pas ce qu’était un travail et qu’il n’avait jamais rien appris à faire, il fut incapable de travailler. Il ne réussit jamais à trouver un emploi. Il était, il est vrai, bien handicapé dans cette démarche, car ne sachant ni lire, ni écrire, ni compter, ni même marcher sur ses deux jambes, c’était quasi impossible.
Un jour, il rencontra une femme. Ses parents l’avaient mis en garde sur un certain nombre de choses. Ils avaient appris de la vie et développé une forme de sagesse à propos des relations de couple. Mais leur fils ne les écouta pas et sa femme se révéla être un parfait démon qui lui mena la vie si dure qu’il sombra dans la dépression. Finalement, il dut quitter sa femme et retourner vivre chez ses parents. N’ayant rien appris, il ne savait pas comment bien choisir.
Chez lui, ses parents devaient s’occuper de lui en permanence, car il ne pouvait ni manger, ni se déplacer, ni même se laver seul. N’ayant absolument rien appris, il ne savait absolument rien faire, même pas s’occuper de lui-même. Ses parents hésitaient, ils pensèrent à le chasser dehors, mais craignant que leur fils meure alors en quelques jours, incapable de survivre dans ce monde si compliqué, ils renoncèrent et leur fils resta donc vivre avec eux.
Mais ses parents vieillirent et finalement moururent. Lorsqu’un matin, il se réveilla affamé attendant son petit-déjeuner, il ne vit personne venir. Il voulut alors se déplacer jusqu’au garde-manger, mais comme il ne savait pas marcher, il en fut incapable. Il y avait bien un téléphone, mais il ne savait pas comment s’en servir. Il était prisonnier de sa chambre. Lui qui n’avait jamais eu faim de savoir, mourut de soif en seulement quelques jours[1].
[1] Cette histoire est extraite de : 10 attitudes gagnantes pour réussir dans la vie (2007).
Ce qui nous distingue du monde animal est justement la soif de connaître. Aucun être, aussi intelligent soit-il, ne peut prétendre avoir fait le tour de tous les sujets. Apprendre, enrichir ses savoirs, c’est le meilleur moyen de comprendre le monde qui nous entoure et d’y évoluer ainsi plus librement.
Extrait du livre : 50 histoires inspirantes pour être heureux, par le docteur Emeric Lebreton et Marc-Olivier Goldmann.
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